Rahel A. Whitewind

Une odeur de papier humide flottait dans la pièce, éclairée par une seule fenêtre dont deux rideaux à moitié troués filtraient une lumière par trop éclatante. Les rayons solaires dansaient impitoyablement dans ce qui ressemblait à une chambre miteuse, mais sans être sale pour autant. Malgré les murs tachés par la moisissure, le parquet ternis et le lit brinquebalant aucun désordre ne régnait dans la pièce soigneusement rangée. Les quelques vêtements étaient parfaitement pliés dans une armoire sans porte, triés par couleurs et par saison. D’ailleurs, leur style bien trop chic tranchaient réellement avec l’ambiance pouilleuse de la chambre. Soieries et tapisserie humide se côtoyait impunément. Qui que soit l’hôte de cette appartement, il était compliqué d’en deviner son statut social ou sa situation.
Le lit vide semblait avoir été déserté depuis bien longtemps déjà, alors que soleil estival dardait tout juste sa chaleur sur une version alternative de Londres. Quelques étages plus bas, une foule colorée se précipitait déjà dans les différentes échoppes, profitant des derniers instants de leurs vacances ou préparant leur rentrée des classes à Poudlard. La foule se déployait dans chaque ruelle comme une seule vague vibrant à l’unisson. Les gens se bousculaient, leurs capes flottant au vent. Ils tentaient de maintenir fixement sous leur bras des balais, une cage à hibou, des manuels scolaires. Trop occupé à essayer de ne rien faire tomber, en prenant garde à ne pas perdre des yeux leurs bambins turbulents, ils ne voyaient pas ce qu’il se passait autour d’eux.
Il ne voyaient pas qu’entre les claquements de capes, les battements d’ailes et les myriades d’étincelles s’échappant des baguette [i]Ils[/ils] s’activaient subrepticement. Tantôt un livre s’évaporait des mains d’un badaud, tandis qu’un balai disparaissait spontanément, qu’une baguette magique se volatilisait de la poche de son propriétaire, à l’instar même de leur gallions et de leur mornilles.
Des enfants, plus ou moins âgés et tous vêtus de haillons se rependait dans les rues comme une masse de rongeurs grouillants, quoiqu’invisibles. Personne ne semblait leur accorder la moindre importance, ne remarquant pas que le nombre de leurs effets personnels diminuaient à chacun de leur passage. Pourtant, aucunes capes d’invisibilités ne couvraient leurs épaules, aucune sorte de poudre magique ou de sort ne brouillaient les sens des quidams. A l’instar de leurs confrères moldus, ces enfants sorciers ne se fiaient qu’à l’agilité de leurs doigts, entrainés depuis des années à subtiliser les affaires des passants.
A la fin de la journée, les enfants se retrouvaient dans un coin sombre de l’allée des embrumes. Ensemble, ils avaient réussi à revendiquer un cul de sac où tout le monde les laissaient tranquille. Ils s’étaient imposés par la force il y’a un un an de cela, menée par une jeune femme à la chevelure d’argent. Ils accouraient d’ailleurs, provenant des quatre coins de la rue, et venaient s’amasser aux pieds d’elle, déposant un à un leur butin.
Rahel se tenait debout, digne, saluant chaque gamin venu déposer son offrande, le gratifiant d’un sourire chaleureux. Elle les avaient récupéré dans la rue, leur avait appris l’art de la débrouille et de l’escroquerie, leur avaient montré comment mendier, apitoyer, mais aussi comment mentir, manipuler.
En un mot comme en mille : comment survire.
Chaque soirs ils se retrouvaient à cette endroit précis, déposant leur butin et le répartissant selon les besoin de chacun. Outre le matériel scolaire notamment utile pour les futurs premières années, ils se partageaient l’argent qu’ils avaient de moins en moins de mal d’amasser.
A l’instar de Rahel ils n’avaient pas ou plus de famille ou bien une famille trop nombreuse dont les parents ne parvenaient pas à nourrir tout le monde.
Pour ce qui était de Rahel, sa mère l’avait délaissé lorsqu’elle avait une dizaine d’année. Cela avait très peu marqué la gamine qui n’avait jamais été très proche de sa génitrice. Quant à son père, elle ne l’avait jamais connu. Rapidement, Rahel a été obligé de faire la manche et de voler pour vivre, alors même qu'elle était une toute petite fille, afin de subvenir à ses besoins et ceux de sa mère. Et elle est devenue particulièrement bonne dans ce domaine. Roublarde dans l’âme, elle aurait pu se contenter de dépouiller les passants. Au lieu de quoi elle s’est mise à fédérer tous les gamins des rues sous une même bannière. Ensemble, ils étaient plus forts. Ensemble ils régnaient dans l’ombre sur le Chemin de Traverse.
Ces gamins se préoccupaient davantage de leur survie que de la situation politique actuelle. La plupart d’entre eux étaient totalement indifférent face aux « sang de bourbe ».
La plupart d’entre eux.
Mais ce n’était pas le cas de Rahel.
Désireuse de grimper les échelons de la société elle reniait les nés moldus sans vergogne. Cherchant à se faire bien voir par les familles de sang purs, elle n’hésitait pas à se plier à leur codes et à leur attentes. Douée dans l’art de la manipulation, elle savait se muer en parfaite petite Serpentarde depuis sa première année à Poudlard. Et elle n’était surement pas prête de s’arrêter en si bon chemin… La prestigieuse école de sorcellerie l'avait conforté dans l'idée qu'elle avait besoin d'argent et de réussir pour maintenir ce niveau de vie dans sa future vie professionnelle. Le vol à la tire l'amusait mais il était hors de question qu'elle y consacre sa vie. A Poudlard, elle se gardait bien de voler quotidiennement mais elle ne se retenait pas si elle en avait l'occasion ou si un élève - ou professeur - possédait un objet précieux ou laissait négligemment traiîer deux ou trois gallions.